Mié. May 1st, 2024

« 1979. Une enquête d’Allie Burns » (1979. An Allie Burns Novel), de Val McDermid, traduit de l’anglais (Ecosse) par Perrine Chambon, HarperCollins, « Noir », 444 p., 22,50 €, numérique 15 €.

C’est un roman particulier, éminemment personnel. Pour 1979, Val McDermid a puisé dans sa propre histoire d’ancienne journaliste, un peu comme elle avait fait pour son premier roman, Report for Murder (« enquête sur un meurtre », 1987, non traduit), qui racontait les aventures de Lindsay Gordon, « journaliste socialiste et lesbienne », sorte de double de l’autrice. Quarante ans plus tard, l’héroïne a changé, l’écriture et le style se sont affinés, mais le thème reste le même : le combat permanent des ­femmes pour être traitées à l’égal des hommes.

Dans 1979, premier tome d’une série qui veut explorer les évolutions de la presse d’investigation, et dont le deuxième volume, 1989, paraîtra en 2025, point de psychopathe ni de ­serial killer. Val McDermid a beau être l’une des figures du « Tartan noir » – le polar écossais, qui comprend des auteurs comme Peter May, Denise Mina ou Ian Rankin –, elle a préféré, ici, axer son travail sur une reconstitution fidèle d’un métier et d’une époque. A la fin des années 1970, les salles de rédaction empestent le tabac, elles vibrent à la cadence des rotatives installées dans des sous-sols qui sentent l’encre et le plomb. Les journées sont rythmées par le cliquetis des machines à écrire, et l’ambiance n’est pas à la tolérance.

Ainsi le premier adversaire de la nouvelle héroïne de McDermid, Allie Burns, se révèle-t-il être la misogynie ambiante : la jeune journaliste est censée se cantonner à des sujets futiles. La vie d’un journal est restituée de façon particulièrement réaliste : on voit la solidarité entre collègues, le stress du bouclage, mais aussi la rivalité et les coups bas. Les dialogues, ciselés, sonnent très juste.

C’est donc l’évolution de l’héroïne qui structure le roman. Au début, la jeune ­Allie Burns s’ennuie au sein du Clarion, tabloïd (fictif) racoleur et conservateur installé à Glasgow.Elle végète, rédigeant des articles sans intérêt, jusqu’à ce que son collègue et ami Danny lui propose de travailler avec lui sur une enquête concernant une fraude fiscale massive. En parallèle, elle se lance dans un sujet sur des indépendantistes qui se verraient bien fonder une armée républicaine écossaise, à l’image de l’IRA en ­Irlande.

Si 1979 détonne par rapport au reste de l’œuvre de Val McDermid, ses lecteurs retrouveront dans ce roman passionnant et bien construit les motifs qui sont la signature de l’Ecossaise : engagement à gauche, féminisme, défense de la cause LGBTQ+. Et surtout une écriture subtile mettant en scène des personnages complexes, dont les failles donnent de l’ampleur à l’intrigue romanesque.

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